Au-dessus des grands bois profondsLétoile du berger sallume…Groupes sur lherbe dans la brume…Pizzicati des violons…Entre les mains, les mains sattardent,Le ciel où les amants regardentLaisse un reflet rose dans leau ;Et dans la clairière indécise,Que la nuit proche idéalise,Passe entre Estelle et CydaliseLombre amoureuse de Watteau. Watteau, peintre idéal de la fête...
A des âmes envolées
Ces âmes que tu rappelles,Mon coeur, ne reviennent pas.Pourquoi donc s’obstinent-elles,Hélas ! à rester là-bas ? Dans les sphères éclatantes,Dans l’azur et les rayons,Sont-elles donc plus contentesQu’avec nous qui les aimions ? Nous avions sous les tonnellesUne maison près Saint-Leu.Comme les fleurs étaient belles !Comme le ciel était bleu ! Parmi les feuilles tombées,Nous...
Au Cabaret Vert, cinq heures du soir
Depuis huit jours, j’avais déchiré mes bottinesAux cailloux des chemins. J’entrais à Charleroi.– Au Cabaret-Vert : je demandai des tartinesDe beurre et du jambon qui fût à moitié froid. Bienheureux, j’allongeai les jambes sous la tableVerte : je contemplai les sujets très naïfsDe la tapisserie. – Et ce fut adorable,Quand la fille aux tétons énormes, aux yeux vifs, – Celle-là, ce...
A la mère de l’enfant mort
Oh! vous aurez trop dit au pauvre petit angeQu’il est d’autres anges là-haut,Que rien ne souffre au ciel, que jamais rien n’y change,Qu’il est doux d’y rentrer bientôt; Que le ciel est un dôme aux merveilleux pilastres,Une tente aux riches couleurs,Un jardin bleu rempli de lis qui sont des astres,Et d’étoiles qui sont des fleurs; Que c’est un lieu joyeux...
Je t’aime, avec ton oeil candide
Je t’aime, avec ton oeil candide et ton air mâle,Ton fichu de siamoise et ton cou brun de hâle,Avec ton rire et ta gaîté,Entre la Liberté, reine aux fières prunelles,Et la Fraternité, doux ange ouvrant ses ailes,Ma paysanne Egalité !
Victor HUGO (1802-1885)
Sur une morte
Elle était belle, si la NuitQui dort dans la sombre chapelleOù Michel-Ange a fait son lit,Immobile peut être belle. Elle était bonne, s’il suffitQu’en passant la main s’ouvre et donne,Sans que Dieu n’ait rien vu, rien dit,Si l’or sans pitié fait l’aumône. Elle pensait, si le vain bruitD’une voix douce et cadencée,Comme le ruisseau qui gémitPeut faire croire à la pensée. Elle priait, si deux beaux...
Le front aux vitres
Le front aux vitres comme font les veilleurs de chagrinCiel dont j’ai dépassé la nuitPlaines toutes petites dans mes mains ouvertesDans leur double horizon inerte indifférentLe front aux vitres comme font les veilleurs de chagrinJe te cherche par delà l’attentePar delà moi mêmeEt je ne sais plus tant je t’aimeLequel de nous deux est absent. Paul ÉLUARD (1895 – 1952)Recueil : “L’Amour...
Extase
Mon coeur dans le silence a soudain tressailli,Comme une onde que trouble une brise inquiète ;Puis la paix des beaux soirs doucement s’est refaite,Et c’est un calme ciel qu’à présent je reflèteEn tendant vers tes yeux mon désir recueilli. Comme ceux-là qu’on voit dans les anciens tableaux,Mains jointes et nu-tête, à genoux sur la pierre,Je voudrais t’adorer sans...
Devant la mer, un soir …
Devant la mer, un soir, un beau soir d’Italie,Nous rêvions… toi, câline et d’amour amollie,Tu regardais, bercée au coeur de ton amant,Le ciel qui s’allumait d’astres splendidement. Les souffles qui flottaient parlaient de défaillance ;Là-bas, d’un bal lointain, à travers le silence,Douces comme un sanglot qu’on exhale à genoux,Des valses d’Allemagne arrivaient jusqu’à nous. Incliné sur ton...
Sublime sensation
En fièvre dans mon antre au lever d’une auroreM’épongeant du désir il m’aura pris durantPar un vent de l’Ouest qui soufflait sur la floreD’ humer ton doux parfum ce cruel excitant Tout tachant d’apaiser cette attache au martyreJ’ai vu reflet fantasque au premier rai du jourTes accords en graphie que jouait l’oiseau-lyreA mon esprit brûlant s’embrasant à l’amour Toi qui suis ma...