Authorpoesiedumonde

Le poète et la muse

L

La Chambre, as-tu gardé leurs spectres ridicules, O pleine de jour sale et de bruits d’araignées ? La Chambre, as-tu gardé leurs formes désignées Par ces crasses au mur et par quelles virgules ? Ah fi! Pourtant, chambre en garni qui te recules En ce sec jeu d’optique aux mines renfrognées Du souvenir de trop de choses destinées, Comme ils ont donc regret aux nuits, aux nuits...

Nevermore

N

Souvenir, souvenir, que me veux-tu ? L’automne Faisait voler la grive à travers l’air atone, Et le soleil dardait un rayon monotone Sur le bois jaunissant où la bise détone. Nous étions seul à seule et marchions en rêvant, Elle et moi, les cheveux et la pensée au vent. Soudain, tournant vers moi son regard émouvant ” Quel fut ton plus beau jour? ” fit sa voix d’or...

Ballade en rêve

B

Au docteur Louis Jullien. J’ai rêvé d’elle, et nous nous pardonnions Non pas nos torts, il n’en est en amour, Mais l’absolu de nos opinions Et que la vie ait pour nous pris ce tour. Simple elle était comme au temps de ma cour, En robe grise et verte et voilà tout, (J’aimai toujours les femmes dans ce goût), Et son langage était sincère et coi. Mais quel émoi de me...

En septembre

E

Parmi la chaleur accablante Dont nous torréfia l’été, Voici se glisser, encor lente Et timide, à la vérité, Sur les eaux et parmi les feuilles, Jusque dans ta rue, ô Paris, La rue aride où tu t’endeuilles De tels parfums jamais taris, Pantin, Aubervilliers, prodige De la Chimie et de ses jeux, Voici venir la brise, dis-je, La brise aux sursauts courageux… La brise purificatrice...

Intérieur

I

A grands plis sombres une ample tapisserie De haute lice, avec emphase descendrait Le long des quatre murs immenses d’un retrait Mystérieux où l’ombre au luxe se marie. Les meubles vieux, d’étoffe éclatante flétrie, Le lit entr’aperçu vague comme un regret, Tout aurait l’attitude et l’âge du secret, Et l’esprit se perdrait en quelque allégorie. Ni livres...

J’ai presque peur, en vérité

J

J’ai presque peur, en vérité, Tant je sens ma vie enlacée A la radieuse pensée Qui m’a pris l’âme l’autre été, Tant votre image, à jamais chère, Habite en ce coeur tout à vous, Mon coeur uniquement jaloux De vous aimer et de vous plaire ; Et je tremble, pardonnez-moi D’aussi franchement vous le dire, A penser qu’un mot, un sourire De vous est désormais ma loi...

La ressemblance

L

Sur tes riches tapis, sur ton divan qui laisse Au milieu des parfums respirer la mollesse, En ce voluptueux séjour, Où loin de tous les yeux, loin des bruits de la terre, Les voiles enlacés semblent, pour un mystère, Eteindre les rayons du jour, Ne t’enorgueillis pas, courtisane rieuse, Si, pour toutes tes soeurs ma bouche sérieuse Te sourit aussi doucement, Si, pour toi seule ici, moins...

Les caresses des yeux

L

Les caresses des yeux sont les plus adorables ; Elles apportent l’âme aux limites de l’être, Et livrent des secrets autrement ineffables, Dans lesquels seul le fond du coeur peut apparaître. Les baisers les plus purs sont grossiers auprès d’elles ; Leur langage est plus fort que toutes les paroles ; Rien n’exprime que lui les choses immortelles Qui passent par instants...

Je brûle avec mon âme et mon sang rougissant

J

Je brûle avec mon âme et mon sang rougissant Cent amoureux sonnets donnés pour mon martyre, Si peu de mes langueurs qu’il m’est permis d’écrire Soupirant un Hécate, et mon mal gémissant. Pour ces justes raisons, j’ai observé les cent : A moins de cent taureaux on ne fait cesser l’ire De Diane en courroux, et Diane retire Cent ans hors de l’enfer les corps sans...

Voici la mort du ciel…

V

Voici la mort du ciel en l’effort douloureux Qui lui noircit la bouche et fait saigner les yeux. Le ciel gémit d’ahan, tous ses nerfs se retirent, Ses poumons près à près sans relâche respirent. Le soleil vêt de noir le bel or de ses feux, Le bel oeil de ce monde est privé de ses yeux ; L’âme de tant de fleurs n’est plus épanouie, Il n’y a plus de vie au principe de...