• Paul Eluard

    Et un sourire

    La nuit n’est jamais complèteIl y a toujours puisque je le disPuisque je l’affirmeAu bout du chagrin une fenêtre ouverteUne fenêtre éclairéeIl y a toujours un rêve qui veilleDésir à combler faim à satisfaireUn coeur généreuxUne main tendue une main ouverteDes yeux attentifsUne vie la vie à se partager. Paul…

  • Victor Hugo

    Mes deux filles

    Dans le frais clair-obscur du soir charmant qui tombe,Lune pareille au cygne et l’autre à la colombe,Belles, et toutes deux joyeuses, ô douceur !Voyez, la grande soeur et la petite soeurSont assises au seuil du jardin, et sur ellesUn bouquet d’oeillets blancs aux longues tiges frêles,Dans une urne de marbre…

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    A MA SOEUR LAURENCE

    Je t’aime parce que tu m’aimes, soeur gentille,Parce que dans ce monde où je me sens errerJe n’ai que toi pour bien et pour toute famille,Et parce que je n’ai que ton sein pour pleurer. Je t’aime parce que notre si bonne mère,De sa tombe où sur nous son regard…

  • Théophile GAUTIER

    paysage

    Pas une feuille qui bouge, Pas un seul oiseau chantant, Au bord de l’horizon rouge Un éclair intermittent ; D’un côté rares broussailles, Sillons à demi noyés, Pans grisâtres de murailles, Saules noueux et ployés ; De l’autre, un champ que termine Un large fossé plein d’eau, Une vieille qui…

  • Paul Scarron

    Sur Paris

    Un amas confus de maisons,des crottes dans toutes les rues,Ponts, églises, palais, prisons,Boutiques bien ou mal pourvues ; Force gens noirs, blancs, roux, grisons,Des prudes, des filles perdues,Des meurtres et des trahisons,Des gens de plume aux mains crochues ; Maint poudré qui n’a point d’argent,Maint homme qui craint le sergent,Maint…

  • Christian Gallion

    RESPIRATION

    Pour vos yeux où naissent mes rimes, Pour vos mains douces qui suppriment le gris des journées sans soleil, pour votre teint de sapotille où mes rêves qui s’éparpillent en lents soupîrs vont se noyer, pour votre grâce qui me frôle quand j’entends rire vos paroles au fond de mon…

  • Jorge Luis Borges

    LABYRINTHE

    Il n’y a pas de porte. Tu y esEt le château embrasse l’universIl ne contient ni avers ni reversNi mur extérieur ni centre secret.N’attends pas de la rigueur du cheminQui, obstiné, bifurque dans un autre,Qu’il ait une fin. De fer est ton destinComme ton juge. N’attends pas l’assautDu taureau qui…

  • Alphonse de Lamartine

    Géranium

    Emblème de la nuit, ta fleur rougeâtre et sombre,Géranium, attend la nuit pour embaumer.Ton parfum hait le jour et se répand dans l’ombre.Oh ! dites, dites-moi, vous qui savez aimer,Dieu, comme cette fleur, n’a-t-il pas fait votre âme ?N’est-il pas vrai qu’à ceux dont le cœur est de flammeLe monde…

  • François de Malherbe

    Celle qu’avait hymen…

    Celle qu’avait hymen à mon coeur attachée,Et qui fut ici-bas ce que j’aimai le mieux,Allant changer la terre à de plus dignes lieux,Au marbre que tu vois sa dépouille a cachée. Comme tombe une fleur que la bise a séchée,Ainsi fut abattu ce chef-d’oeuvre des cieux,Et depuis le trépas qui…

  • Emile Nelligan

    BEAUTE CRUELLE

    Certe, il ne faut avoir qu’un amour en ce monde,Un amour, rien qu’un seul, tout fantasque soit-il ;Et moi qui le recherche ainsi, noble et subtil,Voilà qu’il m’est à l’âme une entaille profonde. Elle est hautaine et belle, et moi timide et laid :Je ne puis l’approcher qu’en des vapeurs…

  • Blondel de Nesle

    Li rosignous a noncié la nouvele…

    ( texte original en Vieux Français du XIIè siècle,suivi de sa traduction ) I. Li rosignous a noncié la nouveleQue la sesons du douz tens est venue,Que toute riens renest et renouvele,Que li pré sont couvert d’erbe menue.Pour la seson qui se change et remue,Chascuns fors moi s’esjoïst et revele.Las…