• Louis-Honoré Fréchette

    Amitié

    A Mlle N*** Je connais un petit angeLequel n’a jamais mouilléSa blanche robe à la fangeDont notre monde est souillé. C’est lui qui donne le changeAu pauvre coeur dépouilléQue l’amour, vautour étrange,D’un bec cruel a fouillé. Cet ange, qui vous ressemble,Sous son aile nous rassembleC’est la divine Amitié. Son regard…

  • Charles Guérin

    Souvent, le front posé sur tes genoux…

    Souvent, le front posé sur tes genoux, je pleure,Plus faible que ton coeur amoureux, faible femme,Et ma main qui frémit en recevant tes larmesSe dérobe aux baisers de feu dont tu l’effleures. ” Mais, dis-tu, cher petit enfant, tu m’inquiètes ;J’ai peur obscurément de cette peine étrange :Quel incurable rêve…

  • Charles Guérin

    Le vent est doux comme une main de femme

    Le vent est doux comme une main de femme,Le vent du soir qui coule dans mes doigts ;L’oiseau bleu s’envole et voile sa voix,Les lys royaux s’effeuillent dans mon âme ; Au clavecin s’alanguissent les gammes,Le soleil est triste et les coeurs sont froids ;Le vent est doux comme une…

  • José-Maria de Heredia

    Soleil couchant

    Les ajoncs éclatants, parure du granit,Dorent l’âpre sommet que le couchant allume ;Au loin, brillante encor par sa barre d’écume,La mer sans fin commence où la terre finit. A mes pieds c’est la nuit, le silence. Le nidSe tait, l’homme est rentré sous le chaume qui fume.Seul, l’Angélus du soir,…

  • Louise LABÉ

    Tant que mes yeux pourront larmes épandre

    Tant que mes yeux pourront larmes épandreA l’heur passé avec toi regretter,Et qu’aux sanglots et soupirs résisterPourra ma voix, et un peu faire entendre ; Tant que ma main pourra les cordes tendreDu mignard luth, pour tes grâces chanter ;Tant que l’esprit se voudra contenterDe ne vouloir rien fors que…

  • Nicolas Boileau

    Amitié Fidèle

    (Sur la mort d’Iris en 1654.)Parmi les doux transports d’une amitié fidèle,Je voyais près d’Iris couler mes heureux jours:Iris que j’aime encore, et que j’aimerai toujours,Brûlait des mêmes feux dont je brûlais pour elle:Quand, par l’ordre du ciel, une fièvre cruelleM’enleva cet objet de mes tendres amours;Et, de tous mes…

  • Joseph Addison

    Ode

    The spacious firmament on high,With all the blue ethereal sky,And spangled heav’ns, a shining frame,Their great original proclaim:Th’ unwearied Sun, from day to day,Does his Creator’s power display,And publishes to every landThe work of an Almighty Hand. Soon as the evening shades prevail,The Moon takes up the wondrous tale,And nightly…

  • Louis-Honoré Fréchette

    Le rêve de la vie

    A vingt ans, poète aux abois,Quand revenait la saison rose,J’allais promener sous les boisMon coeur morose. A la brise jetant, hélas !Le doux nom de quelque infidèle,Je respirais les frais lilasEn rêvant d’elle. Toujours friand d’illusions,Mon coeur, que tout amour transporte,Plus tard à d’autres visionsOuvrit sa porte. La gloire sylphe…

  • José-Maria de Heredia

    Aux montagnes divines

    Glaciers bleus, pics de marbre et d’ardoise, granits,Moraines dont le vent, du Néthou jusqu’à Bègle,Arrache, brûle et tord le froment et le seigle,Cols abrupts, lacs, forêts pleines d’ombre et de nids ! Antres sourds, noirs vallons que les anciens bannis,Plutôt que de ployer sous la servile règle,Hantèrent avec l’ours, le…