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ŒIL DE VERRE

Elle était très laide et me regardait
D’un seul œil
– mais tout le visage en portait la marque –
Il n’y avait que cette affreuse bille bleue que je vois encore
Quand sur le sable de sa tombe déjà oubliée J’écris son nom :
Brigitte.
Pourtant, elle était bonne, et d’une main tendre
Me guidait.
Toujours elle jouait, et me consolait
Quand je pleurais.
Dans l’ombre du lac elle disparut un soir.
Sa main ruisselant, je la vois encore
Quand sur le sable de sa tombe déjà oubliée
J’écris son nom :
Brigitte.
Au matin, on la trouvera, noyée.
Le soleil doré,
Heureux, jouait sur la passerelle.
Tout cela je le vis.
(Plus tard, quand je fus homme, on me dit
qu’elle aimait votre valet qui, d’elle, se moquait…)
Personne alors ne vint me consoler, je m’en souviens encore
Tandis que sur le sable de sa tombe déjà oubliée
J’écris son nom :
Brigitte
Brigitte.


P. Mustapää  (Martti Haavio) (1899 – 1973)

 

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