Claude LABARRAQUE-REYSSAC

Stérilité ! …

Je suis un arbre mort et j’attends la cognée ;
Mes rameaux dépouillés ne portent plus de fruits ;
Ma sève a trop coulé ; la dernière saignée
Fut fatale pour moi et je vais vers la nuit…

Avec d’amers regrets je regarde les feuilles
De ceux qui verdissants, s’envolent vers le ciel…
Je ne puis rien donner à l’homme qui recueille,
Et l’abeille en fuyant, loin de moi fait son miel.

Oui, comme l’arbre nu qui va cesser de vivre,
Mon esprit appauvri ne retrouve plus rien ;
Les images, les mots dont l’âme se délivre,
Tout est sorti de moi… J’ai perdu mon seul bien :

Le pouvoir de chanter ce que mon coeur sensible
Eprouvait sous les coups d’un sort capricieux.
D’exprimer ma douleur lorsqu’il me prit pour cible,
De pleurer mon bonheur en chant mélodieux !…

Le pouvoir de créer en moi des personnages
Qui devenaient bientôt si réels et si forts,
Qu’il me fallait alors accumuler les pages
Pour me délivrer d’eux, leur donner vie et mort ! …

Pour ce devoir sacré, j’étais fière de vivre ;
J’oubliais mes échecs, mon destin tourmenté…
Ce que j’imaginais parfois me rendait ivre
Et je vivais leur vie avec intensité…

Aussi, lasse à mourir de n’avoir rien à dire.
Je lève vers le ciel mes regards implorants ;
Mais le ciel reste sourd et je dois le maudire
Puisqu’il donne à nos jours l’avant-goût du néant…

Claude Labaraque-Reyssac