Comme deux arbres bien semblables
Tournés vers le même horizon,
Nous partageons les nourritures
Et plions sous les mêmes souffles.
Serai-je encore seul sur la terre
Maintenant que je t’ai nommée?
Ai-je abdiqué la solitude
Pour t’avoir prise entre mes bras?
Comme deux grands arbres voisins
Nous mêlons feuilles et racines,
Et la brise qui nous traverse
N’en a qu’une âme et qu’une odeur.
Je te prends dans ma solitude!
Elle est si profonde et si calme
Que le bruit de nos deux haleines
Est trop faible pour l’émouvoir.
Comme deux arbres vigoureux
Nous poussons dans un ciel limpide
Deux jets de sève parallèles
Eternellement exilés.
Pourtant, dès que le vent s’élève,
De nos frondaisons confondues,
Il chasse une musique unique
Qui ne trahit qu’un seul désir.
Georges Duhamel (1884-1966)