Il me parle faussement détaché
d’angoisse et de bitume qui colle
il tourne autour de son cou
deux fois sa longue écharpe
ses lunettes solaires réfléchissantes
aveuglent son regard blanc
même au plus clair du jour
et il fait maintenant nuit pleine
il lui faut un casque pour son blues
et les néons gueulards de la rue
ne lui suffisent pas
pour saisir son tempo :
il vit à contre-jour
il respire à contretemps
il n’a jamais vu la vie
autrement qu’en ancien voyou
trop lâche pour la prison :
il n’en serait jamais revenu
c’est une sorte de taulard
enfermé hors les murs
et qui puise son courage
dans le son de sa voix
et de ses propres mensonges
ses mythes ont fait long feu :
le ghetto qu’il s’est créé
limite à jamais son imagination
même entre ses deux mains ouvertes
il ne voit qu’un mur
lorsqu’on croirait qu’il danse
ce sont ses parasites mentaux
qui s’agitent en lui en tous sens
la valeur de son monde
se trouve dans la sueur
de ces mains qu’il étreint
et qui sous les lumières du carrefour
projettent toutes la même ombre
Jean-Marie Flémal