L’écriture est attente. Attente des surgissements. Attente des explosions. L’écriture est désert. Souffle assoiffé qui brûle le disciple. Sol désséché avant la mousson. L’écriture est vide. Une surface glacée et lisse. Un continent-silence. L’écriture est abnégation. Tuer les désirs et se vouer au seul désir. Et le tremper et le dérouiller dans l’acide du devoir. Elimer le désir, le décortiquer, l’aplanir, le transmuer, l’égréner, l’agencer avec la précision d’un orfèvre. L’écriture est souffrance. Ouvrager jusqu’à l’écoeurement et ternir le drap blanc de ses larmes encrées. L’écriture est la langue. La miner de l’intérieur. La subvertir. Détruire. Et la créer. Recréer. Les vertiges des insurrections et des illuminations. L’écriture est obsession. Lame aiguisée qui insuffle ton imaginaire. Et excise les lointains féconds. L’écriture est dévoilement et masque. L’être écarte les branches, les veines et les chênes afin de naître au plein-soleil. L’être perce la gangue des apparences. L’être affole le dire ordinaire. L’être aux confluents souille et altère son essence. Les sortilèges de la création. Délivrance et enchaînement. L’écriture est alchimie. Puiser dans l’arrière-pays. A l’endroit des monstres et de l’inconnu. L’écriture est lecture. Ecouter et convertir les cris enragés des loups. Baudelaire, Cesaire, Rimbaud. L’écriture est don. Casser son corps et le donner à l’ami, à la femme, à l’enfant, au mendiant, au passant. Donner rêves et espoirs. Forces et fragilités. Donner à ceux qui n’ont que pour seul vêtement leur dénuement. L’écriture est toi. La lettre ferrée et fébrile attend que la courbure de tes lèvres l’épouse. Et l’aime. L’écriture est poème. Ma folie inlassable. Ma raison de croire. Et de vivre.
Umar Timol
avec l’aimable authorisation de l’auteur