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Partir

P

Partir vers les rives du rêve ; Partir sur l’aile des désirs, Sur le voilier d’or qui s ‘élève Au gré des vents et des zéphyrs. Partir lorsque le jour s’achè Ve, Que brille l’étoile du soir ; Ne plus entendre lente, brève, Sonner l’heure du désespoir. Dans l’air où les roses se meurent, Où tout est un hymne vers Dieu, Autour des grands jets d’eau qui pleurent, Quand l’iris exhale un adieu...

el desdichado

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Je suis le ténébreux, — le veuf, — l’inconsolé, Le prince d’Aquitaine à la tour abolie : Ma seule étoile est morte, — et mon luth constellé Porte le soleil noir de la Mélancolie. Dans la nuit du tombeau, toi qui m’as consolé, Rends-moi le Pausilippe et la mer d’Italie, La fleur qui plaisait tant à mon cœur désolé, Et la treille où le pampre à la rose s’allie. Suis-je...

Demain dès l’aube

D

Demain, dès l’aube, à l’heure où blanchit la campagne, Je partirai. Vois-tu, je sais que tu m’attends. J’irai par la forêt, j’irai par la montagne. Je ne puis demeurer loin de toi plus longtemps. Je marcherai les yeux fixés sur mes pensées, Sans rien voir au-dehors, sans entendre aucun bruit, Seul, inconnu, le dos courbé, les mains croisées, Triste, et le jour pour...

jeunesse

j

Nous n’avons pas fini de renouer les rêves dont tous les fils se sont cassés aux doigts des autres et de jeter aux mains qui retombent, lassées, le regard supérieur de nos jeunes dédains. Nous n’avons pas fin de rire en écoutant la Grise Expérience chevroter ses conseils, ni de t’attendre au coin de nos vertes années, Amour. Nous n’avons pas fini de tourner le bouton...

Nocturne

N

Oh que le temps me pèse Depuis ce jour funeste Où tu m’as dit fort aise Va-t-en je te déteste Mais que t’ai-je fait Je songe à ma malchance Je songe à mon malheur Je songe à mon destin Je songe à ma douleur A ce qu’avant je fus A ce qu’hier j’étais A ce qu’alors je suis C’est à toi que je viens Dire que je suis tien Ton esclave et ton bien Car sans toi mon amie Je ne suis rien à vie Bernard...

Les Amis d’enfance

L

Je me souviens du grand cheval Qui promenait tête et crinière Comme une grappe de lumière Dans la nuit du pays natal. Qui me dira mon chien inquiet, Ses coups de patte dans la porte, lui qui prenait pour un gibier Le tourbillon des feuilles mortes ? Maintenant que j’habite en ville Un paysage sans jardins Je songe à ces anciens matins, Tout parfumés de marguerites. René Guy Cadou (1920...

Avril

A

Avril se balance, Au bord du ciel vert, Ne tient qu’à un fil Je lance des mots, Paroles en l’air, Comme une prière. Si les mots s’envolent Ne retombent pas Pas plus bas que moi, C’est que mon sang bat, Que mes pas s’affolent, Et qu’avril y croit ! Avril se déchaîne, Enchaine ma danse À son ciel de traîne. Il tourne et balance, Méfiance et prudence Par-delà le...

LA FOURMI ET LA CIGALE

L

N’ayant pu mettre en été De côté La récolte suffisante, La Fourmi, presqu’indigente, Humblement s’en fut quêter Quelques sous pour subsister, Elle vint solliciter La Cigale sa voisine, Qui s’appelait Carmosine Et dansait à l’Opéra. Depuis fort longtemps déjà, Cette Cigale économe (Quoiqu’en ait dit le Bonhomme) Avait su garder, en somme, L’argent...

Le Mal

L

Tandis que les crachats rouges de la mitraille Sifflent tout le jour par l’infini du ciel bleu ; Qu’écarlates ou verts, près du Roi qui les raillent, Croulent les bataillons en masse dans le feu ; Tandis qu’une folie épouvantable broie Et fait de cent milliers d’hommes un tas fumant ; — Pauvres morts ! dans l’été, dans l’herbe, dans ta joie, Nature ! ô toi qui...

Sommeil…

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Ministre du repos, Sommeil, pere des songes, Pourquoi t’a-t’on nommé l’image de la mort ? Que ces faiseurs de vers t’ont jadis fait de tort, De le persuader avecques leurs mensonges ! Faut-il pas confesser qu’en l’aise où tu nous plonges Nos esprits sont ravis par un si doux transport Qu’au lieu de raccourcir à la fureur du sort Les plaisirs de nos jours...