Authorpoesiedumonde

Rosette, pour un peu d’absence

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Rosette, pour un peu d’absence, Votre coeur vous avez changé, Et moi, sachant cette inconstance, Le mien autre part j’ai rangé : Jamais plus, beauté si légère Sur moi tant de pouvoir n’aura Nous verrons, volage bergère, Qui premier s’en repentira. Tandis qu’en pleurs je me consume, Maudissant cet éloignement, Vous qui n’aimez que par coutume, Caressiez un...

Quand quelquefois je pense à ma première vie

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Quand quelquefois je pense à ma première vie Du temps que je vivais seul roi de mon désir, Et que mon âme libre errait à son plaisir, Franche d’espoir, de crainte, et d’amoureuse envie : Je verse de mes yeux une angoisseuse pluie, Et sens qu’un fier regret mon esprit vient saisir, Maudissant le destin qui m’a fait vous choisir, Pour rendre à tant d’ennuis ma pauvre...

Quand je pouvais me plaindre en l’amoureux tourment

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Quand je pouvais me plaindre en l’amoureux tourment, Donnant air à la flamme en ma poitrine enclose, Je vivais trop heureux ; las ! maintenant je n’ose Alléger ma douleur d’un soupir seulement. C’est me poursuivre, Amour, trop rigoureusement ! J’aime, et je suis contraint de feindre une autre chose, Au fort de mes travaux je dis que je repose, Et montre en mes ennuis...

La sincère

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Veux-tu l’acheter ? Mon coeur est à vendre. Veux-tu l’acheter, Sans nous disputer ? Dieu l’a fait d’aimant ; Tu le feras tendre ; Dieu l’a fait d’aimant Pour un seul amant ! Moi, j’en fais le prix ; Veux-tu le connaître ? Moi, j’en fais le prix ; N’en sois pas surpris. As-tu tout le tien ? Donne ! et sois mon maître. As-tu tout le tien, Pour...

Un cri

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Hirondelle ! hirondelle ! hirondelle ! Est-il au monde un coeur fidèle ? Ah ! s’il en est un, dis-le moi, J’irai le chercher avec toi. Sous le soleil ou le nuage, Guidée à ton vol qui fend l’air, Je te suivrai dans le voyage Rapide et haut comme l’éclair. Hirondelle ! hirondelle ! hirondelle ! Est-il au monde un coeur fidèle ? Ah ! s’il en est un, dis-le moi...

Solitude

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Abîme à franchir seule, où personne, oh ! Personne Ne touchera ma main froide à tous après toi ; Seulement à ma porte, où quelquefois Dieu sonne, Le pauvre verra, lui, que je suis encor moi, Si je vis ! Puis, un soir, ton essor plus paisible S’abattra sur mon coeur immobile, brisé Par toi, mais tiède encor d’avoir été sensible Et vainement désabusé ! Marceline DESBORDES-VALMORE (1786...

Regret

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Des roses de Lormont la rose la plus belle, Georgina, près des flots nous souriait un soir : L’orage, dans la nuit, la toucha de son aile, Et l’Aurore passa triste, sans la revoir ! Pure comme une fleur, de sa fragile vie Elle n’a respiré que les plus beaux printemps. On la pleure, on lui porte envie : Elle aurait vu l’hiver ; c’est vivre trop de temps ! Marceline...

Point d’adieu

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Jeunesse, adieu ! Car j’ai beau faire, J’ai beau t’étreindre et te presser, J’ai beau gémir et t’embrasser, Nous fuyons en pays contraire. Ton souffle tiède est si charmant ! On est si beau sous ta couronne ! Tiens ! Ce baiser que je te donne, Laisse-le durer un moment. Ce long baiser, douce chérie, Si c’est notre adieu sans retour, Ne le romps pas...

Rêve d’une femme

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Veux-tu recommencer la vie ? Femme, dont le front va pâlir, Veux-tu l’enfance, encor suivie D’anges enfants pour l’embellir ? Veux-tu les baisers de ta mère Echauffant tes jours au berceau ? – “Quoi ? mon doux Eden éphémère ? Oh ! oui, mon Dieu ! c’était si beau !” Sous la paternelle puissance Veux-tu reprendre un calme essor ? Et dans des parfums...

Un moment

U

Un moment suffira pour payer une année ; Le regret plus longtemps ne peut nourrir mon sort. Quoi ! L’amour n’a-t-il pas une heure fortunée Pour celle dont, peut-être, il avance la mort ? Une heure, une heure, amour ! Une heure sans alarmes, Avec lui, loin du monde ! Après ce long tourment, Laisse encor se mêler nos regards et nos larmes ; Et si c’est trop d’une...